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21/7/13 Gesche Wüpper
        L’invraisemblable optimisme de Hollande !

Même si sa population est en train de sombrer dans le pessimisme, le président français reste optimiste. Il parle de reprise, de redressement économique, comme s’il ne pouvait en aller autrement pour son pays.

Le moment choisi ne pouvait être pire que celui-là. Ironie du destin, quelques heures avant que la France se prépare à célébrer avec la pompe habituelle sa fête nationale, elle a subi une avalanche de mauvaises nouvelles. Le plus grave accident ferroviaire, qui s’est produit en France depuis vingt-cinq ans a entraîné la mort de six personnes dans la banlieue parisienne, puis Fitch, la dernière des trois agences de notation à le faire, vient de retirer le triple AAA à la deuxième économie de la zone euro. Juste deux semaines auparavant, la Cour des comptes avait prévenu que le déficit de la France ne pourrait pas être contenu à 3,8 % du PIB comme prévu, mais qu’il serait proche de 4,1 % pour cette année.

Le président François Hollande se déclare optimiste en dépit des mauvaises nouvelles. «La reprise économique est là !», a-t-il asséné à la télévision nationale lors d'une interview. « La seconde moitié de l'année 2013 sera meilleure que la première, a-t-il prédit, la production industrielle a augmenté ainsi que la consommation. » Hollande a également exhorté les Français à penser de façon positive. En raison de l’accroissement de la dette publique, le président n’écarte pas de nouvelles hausses d'impôts.

Hollande adopte la méthode Coué

« Hollande a choisi d'ignorer la réalité», dit la presse française. Il emploie la méthode Coué : une sorte d'autohypnose inventée par le psychologue et pharmacien Emile Coué dans les années 1920. Une personne malade qui croit fermement à sa guérison guérira, selon la théorie de Coué. En effet, il faudrait une forte dose de la thérapie de Coué pour guérir la France qui s’enfonce dans le pessimisme alors que le taux de chômage augmente, que son économie est à la traîne et que sa compétitivité internationale s’érode.

Et c’est sans compter que le moral des ménages français est plombé par une météo exécrable qui règne sur la France depuis l’élection du président, laquelle se conjugue avec d’innombrables hausses d’impôts que le gouvernement socialiste a décrétées depuis son élection en mai 2012. En conséquence de quoi, la confiance des consommateurs a chuté, en juin, à un nouveau record de profondeur.

La production industrielle a reculé en mai

Certes, il existe quelques petits signes qui redonnent l’espoir au président mais, dans l'ensemble, la France ne va pas bien. « La production industrielle est repartie, » a dit Hollande. Selon l’INSEE, elle a augmenté au cours des mois de mars, d’avril et de mai d’à peine 1% pour les trois mois considérés. Mais en mai, elle a diminué de 0,4 % après avoir augmenté de 2,2 % en avril.

Toutefois, cette baisse est beaucoup moins grave que prévu par les économistes. Ils évaluent ces données comme un signe positif et supputent que la France devrait enregistrer une légère croissance au deuxième trimestre après que le pays a glissé en récession en début d’année. Mais comme la Banque de France, l’INSEE s'attend, dans ses dernières prévisions de conjoncture, que la croissance économique remonte à 0,2% au cours du deuxième trimestre. Au troisième trimestre, elle devrait stagner, puis à nouveau remonter à 0,1 %, selon l’INSEE.

La France restera en récession en 2013

Le ministre de l'Economie, Pierre Moscovici, a dit, contrairement à Hollande une semaine plutôt, qu'il est encore trop tôt pour parler d'une «reprise durable». Pour l'année 2013, aussi bien l’INSEE que la Commission européenne ou le Fonds monétaire international envisagent une contraction de 0,1% de l’économie française. L'an prochain, la France devrait renouer avec la croissance, mais celle-ci sera, selon les économistes de la banque BNP Paribas, très faible avec un taux de 0,5 %. (1)

Il en est de même avec l'évolution du chômage. Certes, le nombre de chômeurs inscrits dans les agences de l'emploi est resté stable en mai, avec 3,26 millions de personnes, mais on ne peut pourtant pas parler d’un revirement, comme le clame le président Hollande. (2)

Le taux de chômage reste au-dessus de la barre de dix pour cent

Ainsi, l’INSEE s'attend à ce que 113.000 emplois soient perdus en France pour cette année, et que la création d'emplois subventionnés par l'Etat ne suffira pas à compenser ces pertes. Par conséquent, il prévoit que le taux de chômage devrait s'élever à 10,7 % à la fin de l'année, et si l’on inclut les départements d'Outre-mer, à 11,1 %. Le taux le plus élevé atteint précédemment a été de 11,2 % en 1997, y compris les départements d'Outre-mer.

Comme le gouvernement socialiste de François Hollande n'exclut pas de nouvelles hausses d'impôts, le moral des Français ne devrait pas remonter. Cela devrait avoir un impact sur la consommation des ménages qui, traditionnellement, est le moteur de la croissance de l'économie française. La confiance des chefs d’entreprise a augmenté en juin pour la troisième fois d’affilée, mais elle reste bien en deçà de la moyenne.

Mais ce n'est pas seulement une question de conjoncture pour l'économie française, car ce pays souffre de problèmes structurels de compétitivité. Hollande a affirmé, à plusieurs reprises, qu'il avait reconnu ce fait et qu’il prendrait les mesures nécessaires. Dans le même temps, les syndicats et l'aile gauche du parti socialiste s’entendent afin que les réformes qui sont si souvent claironnées en France, tombent aux oubliettes.

Gesche Wüpper ( Die Welt)

Notes du traducteur

(1) Ce n'est pas une surprise pour votre serviteur que la croissance soit en berne. Relisez mon article du 5 janvier 2013 "Deux choix radicalement opposés pour sortir la France de la récession économique." La croissance baisse concomitamment avec l’augmentation des prélèvements obligatoires. Pour renouer avec une croissance annuelle de 3%, il faudrait abaisser ces derniers à 33% du PIB comme au bon vieux temps de Jacques Rueff (1896-1978), l’économiste recruté par le général de Gaulle pour redresser la France. En 1941, Rueff perdit son poste à la Banque de France parce qu’il avait le malheur d’être juif dans le régime de Vichy. Libéral et proche de l’école autrichienne, il combattit la théorie de Keynes qui est omnipotente dans les universités et les grandes écoles françaises. Son essai en anglais intitulé « The Fallacies of Lord Keynes General Theory » fut publié, en mai 1947, par les éditions de l’université d’Oxford. C’est la preuve que, dans le pays de Keynes, une opinion divergente pouvait être exprimée librement.

(2) Le gouvernement socialiste a trouvé la parade pour enrayer le chômage : radier les nouveaux demandeurs. Quand la température ne plaît pas au prince, il lui suffit de casser le thermomètre. C’est l’expédient auquel recourt tout gouvernement d’un pays où la séparation des pouvoirs, chère à notre baron de La Brède et de Montesquieu, n’existe pas. La France est le pays des grands principes mais pas de ses applications.


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