www.claudereichman.com


Accueil | Articles | Livres | Agenda | Le fait du jour | Programme

A la une

6/4/11 MaximeTandonnet

                        La société du lynchage !

Samedi dernier, un jeune homme de dix-neuf ans s’est fait lyncher à la gare RER de Noisy-le-Sec par une dizaine de voyous, pour des raisons débiles et criminelles sur lesquelles les chercheurs se passionnent depuis deux jours. Le mode opératoire est désormais bien connu: à dix ou douze, on s’en prend à un individu isolé, on le jette par terre et on le roue de coups de pieds jusqu’à ce qu’il perde connaissance. Le garçon est dans le coma, entre la vie et la mort. La veille, c’est une adolescente de quatorze ans qui était passée à tabac dans le parc de Sceau. Ce genre d’agression souvent sans véritable mobile, ni pécuniaire, ni sexuel, semble se banaliser.

Le lynchage s’impose aujourd’hui comme une sorte de phénomène à la mode. Il ne se réduit d’ailleurs pas à des actes de violence physique. Reflet d’un certain état d’esprit, d’un air du temps, il s’exprime dans la vie politico-médiatique à travers la sinistre habitude de prendre en chasse telle ou telle personnalité coupable de « dérapage verbal » ou de propos non-conformistes, à contre-courant de la pensée unique. D’un seul coup, les médias, la presse, les politiques vertueux se déchaînent, lui tombent dessus et s’acharnent sur son compte pendant plusieurs jours. Est-il besoin de donner des exemples, des noms ?

Il existe même un lynchage ludique, expression d’une férocité « soft », molle, qui s’observe dans les émissions de téléréalité où l’on invite le spectateur à voter en jubilant pour éliminer au fil du jeu les candidats qui lui déplaisent.

Ces faits sont sans aucun rapport pensez-vous ? Je verse, moi aussi, dans l’amalgame, dites-vous ? Mais non, car je vois dans ces phénomènes une même expression de plusieurs travers détestables de notre société :

- une banalisation de la méchanceté, voire de la barbarie : on cogne à l’aveuglette, sans le moindre scrupule, dans la plus totale indifférence envers le sort de la victime ou de ses proches, sinon dans la joie de la voir souffrir ;

- une généralisation de la lâcheté, car les agresseurs chassent toujours en meute, et s’en prennent à un individu seul, une personne isolée ; excusez moi, mais la chasse à courre est une activité qui personnellement m’a toujours révulsé…

- une montée de la haine, de l’intolérance, de la mesquinerie, de la bêtise en un mot, du refus d’accepter autrui, sa présence dans telle ou telle gare ou cité, ou bien la différence d’opinion qu’il exprime, à travers la diabolisation de la parole politiquement incorrecte.

Bref, une lourde, une terrible régression…

Maxime Tandonnet

Accueil | Articles | Livres | Agenda | Le fait du jour | Programme