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Suard et Picart, bienfaiteurs de la société

4/10/03 Claude Reichman
A l'origine de la faillite d'Alstom, il y a la justice française. C'est elle qui a brisé cette entreprise il y a huit ans en mettant en accusation son président de l'époque, Pierre Suard, pour des motifs absurdes. Pierre Suard, qui n'avait strictement rien à se reprocher, s'est évidemment mal défendu. Il croyait naïvement que sa bonne foi ne pouvait être que reconnue. Malheureusement pour lui et pour Alcatel Alsthom, qui était alors la première entreprise française, il ne s'agissait nullement, dans ce procès, de culpabilité ou d'innocence. L'objectif poursuivi par la justice était de punir un puissant. Non pour ce qu'il avait fait, mais pour ce qu'il était. L'objectif a été parfaitement atteint. Tout ce qui a suivi, qu'il s'agisse de l'éclatement de l'entreprise ou des erreurs de sa gestion, n'a été que la conséquence de sa déstabilisation judiciaire.
Aujourd'hui, chaque contribuable français est contraint de mettre au pot pour tenter de renflouer Alstom (qui a perdu son h dans la bagarre, mais pas que lui !). Gageons que bon nombre de ces contributeurs ont applaudi à la chute de Pierre Suard. On serait tenté de dire : bien fait pour eux. Mais c'est surtout bien fait pour nous tous, pris collectivement en tant que Français. Car nous sommes les citoyens consentants de la république de l'envie. C'est ce sentiment délétère - un péché capital, ne l'oublions pas - qui est en réalité la véritable constitution politique de notre pays. En son nom, les majorités se font et se défont, les assemblées légifèrent, les tribunaux condamnent et la presse se déchaîne. Disons-le tout crûment : c'est un système honteux, indigne d'un pays civilisé. Il a pris naissance en 1789 et ne nous a plus jamais lâchés depuis. Les fameux droits de l'homme, dont on nous rebat les oreilles, étaient une très belle invention. Par malheur, ils n'ont jamais été respectés chez nous, et maintenant moins que jamais. Nous n'avons eu droit qu'à une incessante oppression, qui nous laisse aujourd'hui sans droits de propriété ni protection judiciaire. Dans un état proche de l'esclavage, ou, si l'on préfère, de sujets d'une dictature, ce qui revient à peu près au même.

Réprimer l'envie et châtier les envieux

Au nombre des exploits judiciaires, il faut évidemment compter l'affaire Buffalo Grill. La cour de cassation vient de désavouer la juge d'instruction qui avait cru pouvoir imputer à cette chaîne de restaurants populaires le décès de deux victimes de la maladie de la vache folle. Cette affaire n'aurait jamais dû éclater. Dès le début, il était évident pour tout le monde - sauf pour la justice - qu'on ne pourrait jamais prouver quoi que ce soit, puisque les personnes décédées, même s'il leur était arrivé de manger dans un Buffalo Grill, s'étaient évidemment approvisionnées et nourries dans une foule d'endroits. De plus leur contamination était antérieure à l'embargo sur la viande anglaise. Or toute l'accusation reposait sur un éventuel non respect de cet embargo par Buffalo Grill. On comprend aussitôt que, comme dans l'affaire Alcatel Alsthom, il ne s'agissait pas de rendre la justice, mais de briser une entreprise florissante et son emblématique patron, Christian Picart, coupable d'être parti de rien, d'avoir monté deux cent soixante restaurants et donné du travail à plus de six mille personnes, sans compter les milliers d'emplois induits.
Tous coupables ! Oui, nous sommes tous coupables. Les juges, qui, dans les deux cas cités, se sont foutus des conséquences humaines de leurs décisions. Les journalistes, qui sont allés à la curée comme les charognards qu'ils sont trop souvent devenus. Et les politiciens, surtout les politiciens, trop heureux de laisser livrer de la chair fraîche à la plèbe des arènes afin de la détourner du spectacle de leurs magouilles et de leurs turpitudes. Quant à nous, qu'on appelle les citoyens, qu'avons-nous fait pour que les choses se passent autrement ? Rien ! Ah si, nous avons fait quelque chose : nous avons dit à un copain que toutes ces histoires étaient un peu bizarres - non ? , et nous avons ouvert la télévision pour nous régaler du spectacle.
La première tâche d'un gouvernement digne de ce nom consistera à réprimer l'envie et à châtier les envieux. Pour cela, rien de tel que de mettre à l'honneur le travail et la réussite. " Mieux vaut faire envie que pitié ", dit la sagesse populaire. Elle a raison. On doit être fier d'une réussite méritée. On doit avoir honte de souhaiter la destruction de ceux qui réussissent. Des hommes comme Pierre Suard et Christian Picart devraient être honorés comme des bienfaiteurs de la société. Ils ont su créer de la richesse et des emplois, et tout le monde en a profité. Au lieu de cela, on a voulu les abattre. Demain, quand la France sera redevenue la France, c'est-à-dire un pays qui affichera les plus belles vertus de son peuple et non plus ses vices, on honorera les vrais créateurs et on blâmera les envieux. Qui n'auront plus qu'à se cacher, alors qu'ils tiennent aujourd'hui le haut du pavé.
On entend encore sur les ondes une chanson de ce faux fils du peuple - fils de bourgeois en réalité - qu'est Renaud. Il y fustige " Madame Thatcher ". Il faut le prendre de qui cela vient. Encore tout bouffi, Renaud vient à peine de sortir - pour combien de temps ? -, de la déprime et de l'alcool. Margaret Thatcher a pris de l'âge, a perdu son époux, mais elle se tient toujours droite. Hombre ! comme on dit en Espagne.

Claude Reichman

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