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28/9/10 Ivan Rioufol
                      La talibanisation des cités

A ceux qui douteraient encore (mais seuls les sociologues s'obstinent à ne rien voir des réalités de la société) du poids des nouvelles cultures dans les préjugés racistes, antisémites, sexistes, homophobes à l'œuvre dans des cités, je leur conseille la dernière enquête du ministère de l'Education, du 22 septembre, à propos des discriminations en milieu scolaire. Il y est écrit notamment : "Une culture machiste de jeunes garçons qui ont tendance à occuper l'espace public se développe. On assiste également à des comportements violents de la part de filles, pour mieux être acceptées dans un groupe. La prégnance de ces groupes d'appartenances multiples amène à rejeter ceux qui sont différents. Certains intervenants (entendus au cours de l'enquête) rappellent qu'il n'est sans doute pas souhaitable de survaloriser les différences car on risque un effet contre-productif."

Des évidences, certes. Néanmoins.il est important qu'elles soient dites par un organisme officiel. D'autant que le sociologue Hugues Lagrange, qui vient d'admettre le poids des cultures dans les violences, multiplie depuis les contorsions pour espérer la clémence de sa caste, en récitant que "la diversité culturelle est non pas un problème mais une richesse" (Libération, ce lundi).

C'est cette même brutalité du sexisme qui sera décrite, mercredi sur Arte, dans un reportage que je vous recommande, La Cité du mâle, réalisé par Cathy Sanchez et produit par la société Doc en Stock dirigée par Daniel Leconte, un journaliste de l'audiovisuel qui fait beaucoup pour que des vérités soient dites. Ce document, prévu initialement pour être diffusé le 31 août parmi d'autres illustrations sur la condition de la femme dans les banlieues, avait été déprogrammé in extrémis suite à des menaces, le reste de l'émission ayant été maintenu. C'est l'ensemble du thème qui sera rediffusé, à partir de 21h35, y compris l'intéressant dialogue entre Malika Sorel et Serap Cileli.

Ce film n'apprendra évidemment rien à ceux qui ont leurs yeux pour voir et leurs oreilles pour entendre. Mais là aussi, il est important de constater une tendance, observable ici et là dans certains médias, à ne plus cautionner les non-dits sur des repliements identitaires, portés par des cultures et des traditions dont les valeurs, qui puisent le plus souvent dans l'islam le plus fruste, se heurtent à celles de la République laïque, égalitaire et respectueuse de la femme.

La Cité du mâle
reproduit l'actuelle condition des femmes à Vitry-sur-Seine (Val-de-Marne), dans le quartier où, en octobre 2002, Sohane Benziane, 17 ans, avait été brûlée vive dans un local à poubelle par son ex-petit ami. De ce drame, qui allait en annoncer d'autres d'une égale brutalité, naissait l'association Ni putes ni soumises, qui se lançait dans un combat contre le machisme dans les cités d'immigration.

Or, près de 10 ans après, le film montre que la barbarie est toujours là. Des jeunes interrogés ne montrent aucune compassion pour le sort de Sohane. "Qu'elle crève, qu'elle aille en enfer", dit l'un qui "parle sur le Coran" tandis qu'un autre se flatte d'avoir "fait pisser le sang" à sa petite sœur rentrée tard, en menaçant de lui "défigurer le portrait". La talibanisation d'une cité se dévoile, à travers une somme d'intolérances qui exigent par exemple qu' "une fille bien, ça rase les murs, ça regarde pas dans les yeux, ça se marie dans les traditions". Et "ça" porte le voile. Ce "fascisme ordinaire", ainsi nommé par le documentaire, qui s'en inquiète ?

Ivan Rioufol



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