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6/12/09 Eric Revel

2013 : Les systèmes de retraite font faillite !

À la veille des fêtes de Noël, l'effet fut glacial sur le moral des uns et des autres. La statistique frappa, dans un premier temps, les esprits des journalistes puis des citoyens européens comme jamais... Eurostat, l'office statistique des Communautés européennes, publia un chiffre, à la fin 2012, qui inquiéta beaucoup de gouvernements : sur 27 pays européens, seuls une dizaine possédaient un minimum vieillesse. Et sur ces derniers, deux ou trois pays seulement parvenaient à augmenter réellement et régulièrement le pouvoir d'achat de leurs citoyens les plus âgés. Près de 50 % des retraités européens n'avaient plus les moyens financiers suffisants pour subvenir à leurs besoins essentiels. Le chiffre fut l'effet d'une bombe, dans un environnement européen de l'Ouest que l'on pensait à l'abri de la grande misère. Nombre de systèmes de retraites nationaux avaient tout simplement fait faillite. Ces systèmes n'étaient plus en capacité d'assurer la viabilité de leurs régimes de retraite.

Résultat, partout en Europe, surtout à l'Est, on assistait à des « spectacles » hallucinants. À la fin des marchés, ou devant les poubelles des grands supermarchés, un ballet de personnes âgées aux cabas percés s'agitait pour récupérer les déchets et autres invendus. Un marché parallèle de la récupération était né. Il faisait florès de Bucarest jusqu'à Budapest et Varsovie... Début 2009, la Roumanie avait sombré dans une récession économique comme jamais cette nation n'en avait connu. Un pays dans lequel dorénavant les ménages incapables de payer leurs crédits revendaient leurs voitures et leurs appareils électroménagers.

La misère s'installait dans les rues des ex satellites de l'Union soviétique. Du coup, ces produits de « récupération » faisaient vivre sur le Vieux Continent des centaines de milliers de seniors déshérités. Des seniors qui avaient de plus en plus de mal à se loger et qui de ce fait n'hésitaient pas à recourir à la colocation, comme à l'époque des études universitaires.

Les conditions sanitaires et la santé de ces malnutris se dégradaient. Ils se nourrissaient aussi d'épluchures glanées ici et là. Certains les appelaient les «malgré eux », comme pour dire qu'ils étaient tombés dans la misère malgré le fait qu'ils avaient travaillé toute leur vie, et payé un loyer, aussi...

Dans cette population, les experts médicaux identifiaient maintenant le même type de maladies que dans celles des pays les plus pauvres de la planète.

Cette évolution désastreuse ne constituait que la partie émergée de l'iceberg de la transformation sociale. Elle avait été si profonde et si soudaine depuis la grande crise de 2009... En Europe, en France par exemple, les modes de consommation avaient considérablement changé pour ceux qui disposaient des moyens financiers. D'abord par défiance envers un système bancaire dans lequel une grande majorité avait perdu totalement confiance.

La consommation des ménages fut longtemps un moteur puissant, partout en Europe, de la croissance de ce cher et vieux continent. Là aussi, la France possédait, de ce point de vue, une spécificité. Sa consommation constituait une sorte d'exception européenne formidable. En Grande Bretagne et en Espagne, du fait de la grande crise, les ménages avaient stoppé leurs achats. En Allemagne, avant les évènements économiques, les salaires avaient été bloqués, Du coup, le pouvoir d'achat n'offrait que peu de possibilités. La consommation outre Rhin était à l'arrêt. Dans cet océan de morosité consumériste, seuls nos « petits » ménages français résistaient comme le célèbre village gaulois. Et puis tout bascula fin 2010. Ceux qui estimaient que la vaillance des achats des Français était le signe d'un début de reprise généralisée en furent pour leur frais !

Les économistes avaient pourtant prévenu : l'augmentation du déficit public et du chômage finiraient, selon les théories économiques, par avoir raison du reste de tonicité de la consommation des ménages gaulois ! C'est ce qui se passa. Le déficit français explosa, car il fallait bien financer les plans de relance et combler le puits sans fond de la sécurité sociale, dont le déficit était estimé pour la seule année 2010 à 30 milliards d'euros. Le chômage s'était encore accru d'un million de personnes dans l'Hexagone.

L’effet fut sévère sur les statistiques et le moral de tous. Mais surtout ce fléchissement français sonna la fin d'un type de consommation qui avait fait la gloire des années « bling bling ». La crise de 1929 avait révélé une situation de non consommation : une dépression économique en face d'une surproduction. La catastrophe économique fut totale. En 2009, nous avions été plongés au coeur d'une crise de surconsommation, Personne n'avait voulu écouter et décrypter le message des années précédentes: la flambée du prix des matières premières avait pourtant signifié que les ressources et l'environnement devaient rares. Le temps du monde fini commençait...

Eric Revel

Extrait de « Demain, rien ne sera plus comme avant » (Editions Ellipses).


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