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28/6/10 Thierry Desjardins
      Les préfets chasseurs de primes
               comme au Far West !

On en apprend tous les jours de bien bonnes ! « Le Parisien » révèle ce matin que, depuis la fin de l’année dernière, les préfets et les sous-préfets touchent « en douce » des « primes aux résultats en fonction de critères édictés par le gouvernement en matière de sécurité publique, routière et d’aide à l’emploi ». Ces primes peuvent aller de 14.000 à 66.000 € par an.

Certains diront qu’il était nécessaire d’inciter nos fonctionnaires à travailler et que « le bâton » ne pouvant pas être utilisé contre nos ronds-de-cuir, en vertu du statut des fonctionnaires qui leur garantit la plus totale impunité, il ne restait que « la carotte » pour les pousser à remplir leur devoir.

Ces primes aux résultats posent tout de même un certain nombre de questions.
D’abord, cela signifie le plus officiellement du monde que le préfet ou le sous-préfet qui ne fait strictement rien, qui n’a aucun résultat, qui somnole confortablement dans son petit palais de la République a parfaitement le droit de toucher son salaire de base et que, puisqu’il renonce à ses primes, personne ne pourra jamais lui reprocher de ne faire aucun zèle.

Ensuite, évidemment, ces petites grattes, ces petites ristournes, ces petits backchichs (qui ne sont, d’ailleurs, pas si modestes que cela) vont inciter nos représentants de l’Etat à trafiquer un peu les statistiques qu’ils doivent communiquer à leur administration. On va minimiser les incidents, les accidents et faire sortir un certain nombre de chômeurs des catégories les plus décourageantes pour avoir droit à sa carotte et arrondir ses revenus. Les préfets deviennent des « chasseurs de primes », comme au Far West !

On peut naturellement aussi se demander si, au lendemain des scrutins électoraux, des primes substantielles ne seront pas accordées à certains préfets qui auront obtenu des « résultats » particulièrement satisfaisants pour le pouvoir.

Enfin –et c’est, bien sûr, le plus grave- cette nouvelle conception du service public va pourrir notre administration. Jusqu’à présent les « commis de l’Etat », grands ou petits, avaient leur dignité : ils « servaient la République ». Maintenant ils sont… au pourboire, comme les loufiats d’autrefois.

En période d’austérité, de réduction du nombre des fonctionnaires, cette innovation scandaleuse est diablement révélatrice de toute la « philosophie » du sarkozisme. Le fric, le fric, le fric !

Autrefois, un bon préfet avait de l’avancement, éventuellement la Légion d’Honneur. Maintenant, il a un chèque. Comme un footballeur qui marque un but ou un cycliste qui ne s’est pas fait pincer au contrôle antidopage.

La régionalisation avait déjà privé les préfets de la plupart de leurs pouvoirs de contrôle et facilité bien des dérives (et le mot est faible). Mais maintenant qu’on les met au pourboire il va leur être difficile de se montrer intransigeants au nom des grands principes de la République.

Thierry Desjardins



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