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1/2/10 Michel de Poncins

Quand le président verse des larmes de crocodile sur ses victimes !

Le lundi 25 janvier, le président de la République très provisoirement en vigueur s'est présenté devant un panel soigneusement sélectionné, voire chapitré par la chaîne de télévision TF1. En fait, ce panel se composait principalement des victimes de la politique qu'il mène depuis des années dans diverses fonctions. Certes, il n'est pas seul responsable de la politique en question car ses prédécesseurs Giscard d'Estaing, Chirac ou Mitterrand ont également créé ou maintenu les calamités dont les victimes se trouvaient devant lui. L'origine en effet des situations très médiocres et quelquefois tragiques qui furent exposées se trouve dans l'économie administrée et le socialisme que subit la France depuis des décennies.

Sa responsabilité cependant est bien plus grande que celle de ses prédécesseurs. En effet, lors de son élection en 2007 il avait toute possibilité de rompre avec le socialisme d'une façon extraordinairement rapide et totale, en réalisant la nécessaire « libération » du peuple français. Il ne l'a pas fait et s'est contenté de gesticuler à la fois en France et à l'étranger sans faire aucune vraie réforme sauf à la marge. La cérémonie du 25 janvier comptait parmi ces gesticulations, dont la presse étrangère se moque ouvertement avec entrain et régularité.

Voici la description rapide de quelques membres du panel.

Nathalie, 26 ans, bac plus cinq en marketing : chômeuse.

Pierre, cégétiste breton dans la filière auto : a pleuré sur les licenciements et la liquidation des entreprises.

Bernadette, mère de famille, employée dans les grandes surfaces, n'a bénéficié ni des baisses d'impôts, ni de la revalorisation des bourses d'Etat, ni des heures supplémentaires.

Jimmy, patron routier à Douai : souffre de la taxe carbone et des difficultés pour obtenir du crédit.

Sophie, productrice de lait dans le Tarn : la misère est telle qu'elle ne se paie plus depuis un an.

Samir, enseignant contractuel à Gagny : son contrat est renouvelé chaque année et il voudrait bien être titularisé pour échapper à l'incertitude.

Marguerite, senior au chômage depuis cinq ans.

Elodie, autoentrepreneuse, se plaint de dysfonctionnements du système.

Martine, infirmière aux urgences : dans son hôpital le drame est tel qu'elle soigne les patients dans le couloir.

Jean-Georges : retraité parfaitement misérable après pourtant une carrière intéressante ; par suite de malheurs juridiques son appartement a été saisi et il se trouve à la rue.

Devant ce panel, une première remarque vient à l'esprit. Sur les onze personnes censées représenter le peuple français, il n'y avait, sauf erreur, qu'un seul membre, et encore non titulaire, de la fonction publique, à savoir l'enseignant contractuel. Il y a bien, ainsi, deux France tout à fait distinctes. D'un coté, « la France d'en haut », c'est-à-dire de l'activité publique. Au sommet, se trouvent les privilèges insensés et la richesse insolente; à la base, les exécutants bénéficient de la semaine des 32 heures, de salaires confortables, de revalorisations automatiques, de retraites abusives, d'un absentéisme spectaculaire, de l'habitude d'empoisonner la vie des autres par un exercice abusif du droit de grève.

De l'autre côté, se trouve la « France d'en bas », c'est-à-dire les membres du secteur privé. Eux seuls créent les richesses faisant vivre tous les autres ; cette France souffre tragiquement des calamités créées par la France d'en haut, laquelle exerce un pouvoir quasi totalitaire dans le cadre d'une démocratie régulièrement trafiquée.

Le fonctionnaire non titulaire présent était un enseignant. Personne ne peut nier l'importance de l'enseignement. Toutefois nous connaissons l'immensité et l'inefficacité de la prétendue éducation prétendue nationale, avec la production régulière d'illettrés, les innombrables professeurs n'enseignant pas pour des raisons diverses, et les syndicats gelant toute idée de progrès. Le président a promis de porter remède à la non titularisation alors que la France croule littéralement sous le nombre des fonctionnaires !

Le cégétiste faisait un peu pitié. Il se croyait en effet obligé de paraître indéfiniment grognon. Cette posture repose sur un pacte non écrit du bipartisme à la française : M. Sarkozy serait un homme de droite et de ce fait un cégétiste se devait de le critiquer. Or, si le président a été élu par des voix plutôt de droite, il est clairement un homme de gauche. J'ai montré ailleurs comment il a fait progresser le socialisme en France d'une façon absolument spectaculaire et à un point que Mme Ségolène Royal n'aurait pas atteint. D'ailleurs il a pris la précaution de s'entourer à des postes importants de ministres socialistes et, dès son arrivée au pouvoir, il a ouvertement donné les clés de la maison aux syndicat : les syndicats font partie intégrante de la France d'en haut. Quelques jours après le 25 janvier, le président s'est rendu à Davos pour proclamer spectaculairement sa méfiance à l'égard de l'économie de marché, cela à la surprise médusée de l'auditoire.

Devant l'exposé des calamités, qui parfois prenait un aspect véritablement douloureux, il a bien su jouer le grand jeu de la compassion vis-à-vis de ses victimes. L’art de la compassion officielle est un atout majeur dans la gestion des calamités à la française. Lors des manifestations contre les fermetures d'usines, nous voyons, de même, accourir les politiques avec leur écharpe au vent pour pleurer avec les autres sur les désastres dont ils sont en fait les responsables !

L'orchestre officiel, tout aussitôt après l'émission, s'est émerveillé du talent présidentiel et de sa connaissance des dossiers jusque dans les plus petits détails. Depuis plusieurs jours, un grand nombre de conseillers travaillant avec l'argent public avaient préparé des fiches sur les diverses questions qui devaient être traitées. L'ouragan des lois qui ruinent la France est si impétueux que personne, sauf mise à jour précise et préalable, ne peut se retrouver dans cette jungle. Malgré la préparation soignée, le président eut toutefois cette phrase étonnante d'ignorance : « Je n'accepte pas que des voitures vendues en France soient produites à l'étranger » !

Les courtisans se sont s'est aussi félicités de l'audience, comme si cela avait un intérêt quelconque pour les victimes ! Il y avait paraît-il de la jubilation dans l'air à l'Elysée !

Certains de mes lecteurs pensent parfois que les calamités sont, hélas, si nombreuses que le chemin pour en sortir n'existe plus. Ce n'est pas exact du tout, car il y a toujours un chemin.

Par exemple, le président a promis que le chômage s'améliorerait bientôt, et dès le lendemain il a reçu des démentis. Son optimisme apparent repose sur une double idée folle : son action créerait de la croissance, ce qui n'est pas vrai car la croissance ne peut pas se créer de toutes pièces ; et cette croissance permettrait de réduire le chômage, ce qui est faux. Si les observateurs sont sceptiques, c'est précisément parce qu'ils savent que le président ne va pas du tout supprimer les freins actionnés depuis longtemps par les pouvoirs publics pour détruire l'emploi. Citons dans le désordre : les 35 heures, la quasi impossibilité de licencier facilement, les droits de succession, l'ISF, les charges sociales, la déferlante de tous les impôts et bien d'autres.

Les remèdes aux calamités et, parmi celles-ci au chômage, existent. La seule condition pour les administrer est la volonté de le faire et, à cette fin, il faut être clair dan sa tête.

Contrairement à l'opinion commune complaisamment nourrie par la propagande publique, ce ne serait pas du tout une politique de rigueur pour la France d'en bas, mais tout le contraire.

La rigueur serait pour la France d'en haut. Les politiques eux-mêmes et le groupe des prédateurs publics au sommet de l'Etat devraient renoncer aux formidables avantages et richesses que leur fournit le partage du butin de la République, lequel représente de 5 à 10 % du PIB enlevé par la force fiscale à la France d'en bas.

Cette explication est essentielle et permet de comprendre pourquoi tout remède efficace reste enfoui dans les tiroirs. L'oppression du pouvoir quasi totalitaire de quelques-uns génère toutes les calamités qui écrasent la France d'en bas.

Michel de Poncins

 

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