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17/3/11 Michel de Poncins
          L’Etat veut ponctionner l’assurance vie !

L'assurance-vie est victime de l'incertitude fiscale : c'est le titre d'un grand journal. Il aurait pu écrire : l'assurance-vie est victime des déficits publics car l'incertitude fiscale est la fille de ces déficits.

La caractéristique essentielle du système sarkoziste, comme de tout système socialisant, est de dépenser à tout va et donc de creuser en permanence les déficits publics. De ce fait, dans tous les couloirs des ministères, les énarchos-socialos galopent à la recherche de ressources nouvelles et l'assurance-vie se présente comme une mine à explorer. Leurs prédécesseurs ne se sont pas gênés depuis longtemps pour y puiser, puisque le paradis fiscal de ces contrats à été violé sous prétexte des prélèvements sociaux, et cela dans une complexité impossible à décrire.

Historique

Un bref rappel nous remettra en mémoire ce qu'est l'assurance-vie.

Les contrats actuels ont été créés en 1976 grâce au fondateur de l'AFER qui, contre toute attente, s'est attaqué aux assureurs-vie de l'époque, lesquels profitaient grassement de l'argent récolté via les contrats d'assurance ayant trait à la vie humaine. Il a voulu associer les titulaires de contrats aux profits sur ces placements. Comme tout novateur, il eut des difficultés jusqu'à l'acceptation d'un essai par une compagnie. Ainsi sont nés les contrats d'assurance-vie que nous connaissons aujourd'hui et qui n'ont rien à voir d'ailleurs avec des assurances sur la vie. Il s'est ajouté ensuite des faveurs fiscales accordées par les pouvoirs publics à ces contrats, ce qui leur a procuré un grand succès, les faisant devenir une sorte de paradis fiscal pour beaucoup de Français. Toutes les compagnies d'assurances se ruèrent alors sur le nouvel eldorado.

Bien sûr il ne faudrait jamais mélanger des problèmes fiscaux à des problèmes d'investissement mais, avec les gouvernements de la fausse droite et de la vraie gauche que nous connaissons depuis si longtemps, il n'est pas possible d'arriver à une neutralité fiscale de tous les investissements.

L'État y a trouvé son compte car, à l'analyse de la répartition des placements des grandes compagnies d'assurance-vie, l'on constate qu'il y a souvent une forte majorité de placements d'État.

Incertitude fiscale

L'incertitude fiscale, dont se plaignent à juste titre les compagnies d'assurances et leurs représentants, déferla dès les débuts, comme dans tous les domaines de la vie nationale, avec l'effet de paupérisation auquel conduit inévitablement cette incertitude fiscale, ce que beaucoup d'économistes ne mettent jamais en lumière.

Voici des exemples.

Les contrats DSK, créés en 1998, furent des contrats d'assurance-vie investis en actions et en unités de comptes, mis en place pour encourager l'épargne placée en assurance-vie à s'investir en actions françaises. Dans le nuage d'usine à gaz habituel, cela gênait les investisseurs en raison de la complexité et de la restriction des choix. Une autre contrainte survint par de nouveaux contrats NSK, créés par la loi de finances pour 2005, et devant comporter au moins 30 % d'actions et 10% de titres à risque.

En 2004, le pouvoir de l'époque avait Renaud Dutreil comme secrétaire d'État aux PME. Par son existence même en tant que secrétaire d'État, il était un obstacle au développement des PME, à leur prospérité et à l’emploi qu’elles génèrent. Il mijota un plan de supposé soutien à ces PME. Il comportait un nouvel impôt qui serait prélevé sur les contrats d’assurance-vie et était annoncé comme devant être « faible » : tout le monde connaît les menaces que ces termes annoncent. Les sommes collectées devaient garnir un fonds censé garantir des prêts aux sociétés de capital risque. Nous ne savons pas si le cauchemar a été réalisé, mais l'incertitude fiscale se manifestait.

En 2006, c'était Villepin. Pour écorner le déficit perpétuel de la Sécu, il fallait deux milliards. La libération de l'assurance-maladie, seul mode efficace de gestion, ne pouvait évidemment pas être envisagée par les hommes au pouvoir, partisans fervents du dirigisme étatique quel qu'en soit le coût pour le peuple français. Villepin avait donc envisagé une gymnastique pour spolier une nouvelle fois les titulaires d'assurance-vie. Les banquiers et les assureurs l'ont fait reculer.

L'incertitude fiscale dont se plaignent aujourd'hui à juste titre les compagnies n'est donc absolument pas nouvelle. On se trouve devant un tremblement de terre permanent à la japonaise, lequel déclenche des répliques en cascade. Leurs représentants constatent une chute de la collecte, et il y a lieu d'en être inquiet.

L'origine de ce micmac se situe comme indiqué plus haut dans les déficits publics, qui obligent le pouvoir, faute de vouloir y mettre fin, à chercher de l'argent partout.

Une barrière de papier

Simultanément, et par une sorte d'aveu implicite, ce pouvoir veut faire inscrire dans la Constitution une soi-disant « règle d'or » pour ces déficits. Admirons la pyramide de papiers imaginée : loi constitutionnelle, lois cadres de programmation des finances publiques sur au moins trois ans, loi organique pour définir les lois-cadres. La pyramide n'a pas du tout pour objet de supprimer les déficits mais seulement d'édicter des règles de bonne gestion. L'objectif annoncé se limite à des pourcentages de déficit par rapport au PIB : on imagine toutes les combines possibles avec de tels critères ! Les lecteurs réguliers de ces articles et bien d'autres savent exactement ce qu'il faut faire, non pas seulement pour réduire les déficits, mais pour les remplacer par des excédents.

Dans ce désordre il y a de dangereuses perspectives. Le demandes de remboursement des propriétaires de contrats d'assurance-vie doivent et peuvent en marche normale être gérés dans la tranquillité. Si la cadence s'accélérait, cela pourrait contraindre les compagnies à vendre des titres en vue de rembourser et certaines pourraient devoir en conséquence afficher des pertes. Les autorités prudentielles ont le droit à tout moment de demander le gel des rachats des contrats, ce qui serait une atteinte grave aux droits de propriété et une sorte de faillite déguisée.

Évidemment, pour les compagnies, cette perspective éventuelle est un argument qui s'ajoute à celui de la souscription aux emprunts publics nécessaires à la nourriture du monstre étatique.

Lord Melbourne, Premier ministre de la Reine Victoria disait : « Le premier devoir du gouvernement est d’empêcher le crime et d’assurer l'exécution des contrats. »

Nous en sommes décidément très loin.

Michel de Poncins



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