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14/5/10 Bernard Martoïa
    La France ne s’en sortira pas sans              chasser les technocrates !

« L’entrée dans la rigueur risque de compromettre la sortie de crise », tel est le titre qui fait la une de l’édition du Monde du 12 mai 2010.

Rappel des faits pour comprendre l’impasse intellectuelle des keynésiens. Ils ont facilement obtenu gain de cause auprès des politiciens en faveur d’une politique de relance par la dépense pour sortir de la crise financière provoquée par la chute de Lehman Brothers le 15 septembre 2008. De notre côté, nous avons martelé que l’on ne soigne pas le mal (endettement) par le mal (encore plus d’endettement) et que cette folie se terminerait par un krach obligataire des Etats.

Force est de constater que nous avons raison. Les keynésiens avaient fait le pari de renouer avec la croissance pour sortir de la crise. La croissance n’est pas au rendez-vous en Europe, mais le krach obligataire l’est avec le défaut de paiement de la Grèce. Seuls les Etats-Unis sont parvenus à renouer avec la croissance. Sont-ils pour autant sortis d’affaire ? Non, car les dettes jumelles publique et privée ne sont pas maîtrisées. Une épée de Damoclès pèse sur leur tête, comme l’a dit avec force, le 22 février 2010, José Pinera lors de son extraordinaire interview sur la chaîne Fox News. (1)

Explication du différentiel de croissance

La croissance du PNB américain devrait atteindre 3,2% alors que la zone euro devrait connaître une contraction de 0,3% en 2010. Comme d’habitude, les Etats-Unis ont été les premiers à entrer en récession et ils sont encore les premiers à en sortir. L’économie française accuse toujours un retard de neuf mois par rapport à l’économie américaine, mais ce retard dans le cycle d’activité n’offre pas d’explication crédible au différentiel de croissance constaté, sur le long terme, de part et d’autre de l’Atlantique.

L’explication réside dans le différentiel de dépenses publiques. L’économiste James Heckman, qui a obtenu le prix Nobel en 2000, a montré une étroite corrélation entre le niveau des dépenses publiques et le taux de croissance moyen sur une décennie. Ainsi les Etats où le niveau des prélèvements obligatoires est le plus faible enregistrent la plus forte croissance. En deçà de 25% de prélèvements obligatoires, la croissance moyenne est supérieure à 7,5% par an. C’est le cas de la Chine qui a enregistré une croissance moyenne de 10 % au cours de la décennie 2000-2010. Pour une fourchette de prélèvements obligatoires, comprise entre 30 et 39% du PNB, le rythme moyen de croissance annuelle tombe à 3,5%. C’est le cas des Etats-Unis. Au-delà d’un seuil de 60%, le rythme ne peut pas dépasser 1,5 %.

C’est le cas de la France technocratique. Avant que les énarques ne prennent les rênes du pouvoir en 1974 avec l’accession à la présidence de la République de Valéry Giscard d’Estaing, ce pays connaissait, comme les Etats-Unis, une croissance moyenne de 3,5 % par an. Les « trente glorieuses » ont été mythifiées parce que les Français sont incultes en économie. Il n’y eu aucun miracle de redressement après la guerre. La France enregistrait une croissance soutenue parce que le niveau des prélèvements obligatoires était dans une fourchette raisonnable de 30 %. Tout s’est gâté à partir de 1974 avec l’arrivée au pouvoir du tandem énarchique Giscard & Chirac. Et depuis cette date fatidique, la France a non seulement perdu sa croissance mais aussi le contrôle de ses finances publiques. Aucun excédent budgétaire n’a été enregistré depuis 1973.

Après le concept de trappe à liquidité inventé par Keynes lorsque la demande de monnaie devient infiniment élastique, nous sommes entrés dans l’ère du concept de « trappe à croissance » inventé par Heckman. A propos de cet économiste nobélisé, ses recherches demeurent largement ignorées dans une France socialiste qui préfère celles de son successeur en 2001, Joseph Stiglitz, ou encore celles de Paul Krugman, nobélisé en 2008. Précisons que ces derniers sont des macro-économistes alors qu’Heckman est d’abord un micro-économiste. Chercher l’erreur !

Les keynésiens n’ont plus d’autre choix que de réduire la voilure de l’Etat avec le retour au carré régalien de l’Ancien Régime. La France avait, à cette époque, un grand économiste en la personne de Jean-Baptiste Say (1767-1832), mais sa loi sur l’offre est tombée en désuétude. C’est pourtant elle qui crée la demande et non point l’inverse. Depuis l’avènement du keynésianisme qui sied parfaitement aux politiciens, on marche sur la tête en prétendant que la demande et le crédit (planche à billet) sont les moteurs de la croissance. Il n’y a point de croissance durable, un concept cher de nos jours aux écolos, sans une épargne préalable. C’est ce que commence à comprendre le journal Le Monde en invitant, pour la première fois, un disciple de l’école autrichienne (2) à exprimer son point de vue sur les origines de la crise économique.

Bernard Martoïa

(1) Archive du 16 mars 2010 : « La banqueroute des Etats-Unis en 2017 ».

(2) Le Monde du 12 mai 2010 : « On ne peut pas résoudre une crise de dette par plus d’endettement », par Thorsten Polleit, chef économiste de Barclays Capital en Allemagne.

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