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19/1/13 Claude Reichman
        La France marche sur les mains et a perdu
                                tout bon sens !  

Quand j’étais en sixième au lycée, il y avait parmi mes copains un garçon particulièrement agile et doué pour la gymnastique. Sa grande spécialité était de marcher sur les mains. Ne parvenant pas à faire d’émules, il jeta son dévolu sur le meilleur matheux de la classe qui se laissa persuader d’embrasser cette discipline exigeante.

Aux récréations, nos deux copains s’installaient sur leurs mains et circulaient tranquillement dans la cour sans que cela soulevât l’émotion de quiconque. Un jour je posai à notre matheux un problème dont la solution - je le lui assurai - requérait une réflexion très poussée dont seul dans la classe il était capable. Je lui décrivis deux trains, partant l’un de Paris et l’autre de Lyon, avec toutes leurs caractéristiques (poids du convoi, nombre de passagers, vitesse etc.), et lui demandai de m’indiquer lequel, au moment où ils se croiseraient, serait le plus près de Paris.

Il se lança dans des calculs complexes et me demanda plusieurs jours de délai pour résoudre le problème, l’affaire demandant qu’il pût y réfléchir dans le calme de sa chambre et non au milieu d’un groupe de copains plutôt chahuteurs. Le malheureux passa une bonne semaine en cogitations acharnées et revint vers moi la corde au cou, avouant son échec et me suppliant de lui révéler la solution de cet insoluble casse-tête.

Je ne lui marchandai pas ma science et lui répondis qu’au moment où les trains se croiseraient, ils seraient à la même distance de Paris (et d’ailleurs aussi de Lyon). Loin de le rassurer, ce résultat l’inquiéta, car il en induisait qu’il avait dû se tromper dans ses calculs. Il me quitta rapidement afin de pouvoir s’y replonger et de parvenir enfin à une réponse mathématique satisfaisante.

J’ai repensé à ce souvenir de classe en apprenant que le patronat et les syndicats français venaient de conclure un accord sur la taxation des contrats de travail courts, avec l’objectif claironné de favoriser les contrats longs. Assorti d’autres dispositions du même acabit et qui ne résoudront pas plus le problème de l’emploi dans notre pays que le fait de pisser dans un violon n’améliore la musique, cet accord a été salué par le président de la République et l’ensemble des médias comme un pas important dans la bonne direction, celle de l’amélioration du « dialogue social », cet exercice obligé de la démocratie à la française dans lequel, comme le recommandait Raymond Devos, « si l’on n’a rien à dire, on en parle » !

Ainsi, en France, en 2013, dans un pays qui compte plus de 5 millions de chômeurs toutes catégories confondues, on croit dur comme fer qu’en rendant plus coûteuse l’embauche d’un salarié, on la rendra plus facile ! Et tout le monde (enfin tous ceux qui ont le droit de s’exprimer dans les médias) est de cet avis. Comment ne pas en déduire que le monde politique, économique, syndical et médiatique - bref nos « élites » - marche sur les mains et a perdu tout bon sens. Terrible constat, car il signifie que l’on ne peut plus lui faire la moindre confiance pour résoudre les problèmes du pays.

Dans son dernier article, Charles Gave écrit : « En fait, il semble bien que la durée de vie de la plupart des institutions humaines depuis l’émergence du capitalisme et de la révolution industrielle soit d’environ 70 ans. Au bout de 70 ans, les institutions deviennent tellement rigides et inflexibles qu’il n’y a pas d’autre solution que leur disparition, en général dans des convulsions extraordinaires. »

Concernant la France, elle vit avec des institutions qui, pour l’essentiel sont nées en 1945. Leur disparition devrait donc intervenir en 2015. Plus que deux ans à tenir !

Claude Reichman
Porte-parole de la Révolution bleue.


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