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Immigration : enfin les vrais chiffres !

24/10/03 Claude Reichman
Il n'y a pas, chaque année, 100 000 migrants légaux en France, comme l'affirme le gouvernement, mais 200 000. Il n'y a pas 20 000 migrants illégaux supplémentaires par an en France, mais environ 200 000. Si bien que le total annuel des migrants supplémentaires dans notre pays s'élève à près de 400 000 personnes, sans compter les naissances qui peuvent être estimées à quelque 100 000 chaque année. Ainsi ce sont près de 500 000 personnes immigrées par an qui s'ajoutent à la population française, soit l'équivalent d'une ville comme Lyon. La différence entre les données publiées par le gouvernement et les vrais chiffres tient à deux raisons essentielles. Parmi les migrants légaux ne sont pas comptés les étudiants étrangers, qui, depuis une circulaire du 15 janvier 2000, sont autorisés à s'établir définitivement dans notre pays. Parmi les migrants illégaux, ne sont pas comptabilisés les titulaires de visas touristiques qui se maintiennent sur le territoire français au-delà de la date d'expiration de leur visa. Dix pour cent des détenteurs des deux millions de visas de tourisme délivrés chaque année par la France  "s'évaporent " ainsi dans la nature.

Ces chiffres viennent d'être révélés dans un ouvrage* écrit par un haut fonctionnaire en charge précisément des problèmes d'immigration, Maxime Tandonnet. Fondés sur des rapports officiels, ils sont accablants pour le pouvoir politique, dont le mensonge permanent éclate enfin au grand jour. Il serait criminel pour l'avenir de la France qu'ils ne provoquent pas le grand débat sur l'immigration que tous nos compatriotes attendent avec anxiété. Car nous sommes face à un phénomène qui est en train de saper les fondements mêmes de notre communauté nationale. En effet, si le mouvement se poursuit au même rythme, les immigrés et leurs descendants pourraient représenter, en 2030, le quart de la population française totale, comme vient de l'indiquer, lors d'un colloque récent, l'Institut de géopolitique des populations. On n'a pas de mal à imaginer les conséquences d'une telle vague de fond sur la stabilité de la société française.

Chirac veut le métissage

Ce que nous vivons en ce moment, qu'il s'agisse de l'insécurité ou des troubles économiques et sociaux, n'est qu'une aimable bluette à côté de ce qui nous attend. N'hésitons pas à le dire : la France va être mise à feu et à sang dans les prochaines années si rien n'est fait. A cet égard, les mesures prévues par le projet de loi sur l'immigration proposé par le gouvernement, même si elles vont dans le bon sens, sont plus qu'insuffisantes. Face à un phénomène d'une telle ampleur, il faut des dispositions d'importance équivalente. Et celles-ci sont d'autant plus difficiles à prendre que la politique des visas et la suppression des contrôles aux frontières relèvent de l'Union européenne. Mais rien ne nous empêche de faire jouer " la clause de sauvegarde de Schengen ", qui permet à tout Etat de rétablir temporairement ses contrôles aux frontières intérieures en cas de " menace pour l'ordre public ou la sécurité nationale ". Qui peut douter qu'il en soit ainsi en France ?

Encore faudrait-il que les autorités de notre pays soient convaincues de la nécessité d'une telle politique. Tel n'est manifestement pas le cas. On se souvient que le président de la République, Jacques Chirac, à l'occasion du transfert des cendres d'Alexandre Dumas au Panthéon, le 30 novembre 2002, a pris position en faveur du métissage de la France. Il ne s'agissait en rien d'un discours de circonstance. La cérémonie avait été préparée de longue main à l'Elysée et M. Chirac voulait en faire un acte fondateur. On voit mal, dans ces conditions, comment la présence à la tête de l'Etat d'un homme politique convaincu des bienfaits, pour la France, d'un mélange de sa population avec celles issues du Maghreb, d'Afrique subsaharienne et d'ailleurs peut être compatible avec une politique restrictive en matière d'immigration.

C'est tout l'enjeu de la politique française au cours des prochains mois et des prochaines années. Nul ne peut douter qu'au rythme pris actuellement par le flux migratoire en direction de notre pays et compte tenu des incidents de plus en plus graves provoqués par une population immigrée mal ou pas du tout intégrée, des évènements dramatiques vont se produire en France. On ne peut davantage douter du fait que cela se traduira par des tensions politiques telles que c'est la démocratie elle-même qui risque d'être emportée dans la tourmente. Combien dérisoires alors apparaîtront les cris d'orfraie poussés par une classe politicienne inhibée par le " politiquement correct " à la seule évocation de ce que pourrait être une véritable politique d'immigration, qui ramènerait celle-ci à la dimension que peut accepter la France sans cesser d'être elle-même.

Jamais le fossé entre les politiciens et le peuple n'a été aussi profond. L'inconscience des élus n'a d'égale que celle qui régnait chez les privilégiés à la veille de la Révolution. A deux siècles de distance, les évènements se répètent. Sans doute parce que les privilèges annihilent toute lucidité chez ceux qui en bénéficient. L'histoire certes bégaye. Mais on discerne très bien ce qu'elle est en train de nous dire.

Claude Reichman

* Maxime Tandonnet, Migrations, la nouvelle vague, 232 pages, 19 €, L'Harmattan.

 

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