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8/11/11 Justin Hayes
              Comment j'ai appris à aimer l'État !

Alors que nous étions étudiants, combien d'entre nous durent rédiger des documents de recherche où l’on nous demandait de « changer le monde » ? Je suis sûr que nous pouvons tous nous souvenir d'un texte semblable à celui-ci : «Si je pouvais changer une chose dans le monde, ce serait comme ça », ou encore : « Comment puis-je rendre le monde meilleur ? » Souvent, ces tâches d'écriture nous étaient données alors que nous n'étions même pas capables de réfléchir à des concepts aussi abstraits que la guerre ou la politique.

Ces essais nous ont-ils aidés à penser de manière critique ? Dans certains cas oui, mais la plupart du temps, ces sujets ne nous ont appris qu’une seule chose : à devenir des planificateurs centraux. L’éducation nationale nous a enseigné que des problèmes sociaux complexes peuvent être résolus par une seule personne (ou quelques fonctionnaires) dans une salle où l'élaboration des politiques publiques de la nation toute entière est conçue.

« Si par exemple nous donnons 1000 $ à chaque pauvre, nous n'aurons plus de pauvreté », nous a-t-on enseigné. Mais l'enseignant n'a jamais demandé d’où venait cet argent. Cela n'avait pas d'importance car, au moins, nous pensions à aider d'autres personnes. L’essentiel était de trouver des «solutions» et d'être «réactif».

« Je pense que nous pouvons sauver l'environnement si tout le monde plante un arbre », avons-nous conclu. L'enseignant n'a jamais demandé comment on peut mobiliser tout le monde. Serait-ce par la force ou par la persuasion ? Cela n'avait pas d'importance. Nous commencions à réaliser l'importance des décideurs politiques pour façonner le monde.(1)

Nous n'avons pas demandé à examiner les nombreuses conséquences imprévues qui peuvent découler de ces nouvelles idées. Où irions-nous trouver les 1000 $ pour chaque pauvre ? Sur quel critère peut-on juger qui est pauvre ? Comment pouvons-nous nous assurer que les 1000 $ dépensés permettront de sortir une personne de la pauvreté ? (2)

Bien sûr, il ne nous a jamais été demandé s'il est moral de voler l'argent des uns pour le donner aux autres. (3) Cela n'avait pas d'importance. Nous faisions juste semblant d'être à la place de l'État.

N’avoir aucune idée pour sauver le monde était pire que d’avoir de mauvaises idées. Les enseignants nous ont appris à respecter la diversité des idées. Leur credo était que toutes les idées se valent et qu'aucune n’est nécessairement meilleure qu’une autre. (4)

Mais comment pouvons-nous espérer que des enfants développent un esprit critique si nous ne pouvons pas leur dire la différence qui existe entre le bien et le mal, de peur d'offenser leur sensibilité ? Que dire si un enfant propose une société fondée sur le principe de non-agression ? Que faire si un enfant demande en premier lieu à l'enseignant pourquoi nous aurions besoin d’un gouvernement ? Ce serait certainement aller à l'encontre de l'amour de l’enseignant pour la planification centrale. La réponse à la question de cet enfant iconoclaste se résume en un seul mot : le chaos. Pour la plupart des enseignants, une société anarchique ne peut être rien d’autre que le chaos et la destruction. Après cette réponse, l'enfant n’y pensera plus pendant des années, voire jamais.

Pourquoi l'enseignant n’est-il pas ouvert à cette idée ? Pourquoi le professeur argumenterait-il contre la proposition de cet enfant ? L'idée est rejetée pour les mêmes raisons qui font qu’une société de télévision qui serait propriétaire d’usines fabriquant des ampoules ne souhaitera jamais consacrer un reportage spécial sur l’existence d’ampoules défectueuses. (5) La plupart des enseignants ne soutiendront certainement pas l'idée que le gouvernement puisse être immoral.

Les écoles publiques sont essentiellement des machines de propagande de l’Etat, mais il n'y a pas de ministre de la propagande ou de haut fonctionnaire au ministère de l'Éducation qui favorise cette propagande. Les écoles publiques, par leur nature même, sont conçues pour promouvoir l’Etat. Elles apprennent aux enfants à accepter que l’Etat soit exonéré du code d'éthique qui empêche que quelqu'un vole les affaires de son voisin. Si l’Etat ne volait pas, les écoles publiques n'existeraient pas.

L’école enseigne aux enfants que les grands problèmes de nos jours ne peuvent être résolus que par des planificateurs centraux. (6) Grâce aux équations mathématiques, les enfants apprennent que les êtres humains sont tellement simplistes qu’une politique publique peut résoudre un problème majeur avec des milliers de variables. L’école apprend aussi aux jeunes que tout peut se construire à partir de rien. (7) L'idée que chaque être est unique et que la libre-pensée individuelle fait face à des choix uniques a été remplacée par le point de vue selon lequel tous les hommes font partie d'un troupeau qui peut être facilement manipulé ou soumis par la contrainte. (8)

Quand les enseignants demandent aux enfants de réfléchir à la façon dont ils aimeraient changer le monde, ils ne font que leur demander comment ils comptent s’y prendre pour contraindre les autres.

Justin Hayes
 

Notes du traducteur :

(1) La fascination des Français pour les sommets G bidule.
(2) L’aide au développement en Afrique.
(3) L’impôt sur le revenu des personnes physiques qui n’est acquitté que par la moitié des citoyens.
(4) Le relativisme des progressistes s’attaque aux dogmes des religions et permet aussi de manipuler plus facilement les foules en dévalorisant les valeurs traditionnelles.
(5) Le conflit d’intérêt.
(6) La Commission européenne qui nous conduit au meilleur des mondes fédéral avec la ruine et la suppression des libertés du peuple.
(7) La relance keynésienne par l’accroissement du déficit budgétaire.
(8) 1984, le livre de George Orwel.




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