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8/4/14 Charles Gave
                    Valls dans la trappe à dette !

Nous avons un nouveau Premier ministre.

A titre gracieux, et sans demander aucune contrepartie, je me fais donc un devoir d’expliquer à notre nouveau chef de gouvernement la situation du pays qu’il va devoir gérer. Depuis des lustres, les politiques français de gauche comme de droite se sont donné un mal de chien pour « botter en touche » (dans le meilleur des cas), ou plus fréquemment pour prendre des décisions qui allaient aggraver les choses. Jamais aucun d’entre eux n’a en effet pris le taureau par les cornes, les emplâtres sur jambes de bois succédant aux incantations de nature religieuse ou morale dignes de la méthode Coué. Ce qui fait qu’aujourd’hui, l’économie française est dans une bien triste situation, que je vais résumer. Et M. Valls va donc soit se défiler comme tous ses prédécesseurs, soit essayer de prendre des décisions courageuses, et dans ce cas (fort peu probable, si l’on en juge par les actions de ses prédécesseurs), il aura besoin d’une considérable force de caractère. Mais mon devoir est de l’informer de ce qu’il va trouver, de faire une sorte de diagnostic.

Etat des lieux

La production industrielle (que je prends comme une mesure de l’activité du secteur privé) stagne en France, après s’être écroulée lors de la grande crise de 2008, pour se retrouver aujourd’hui au même niveau qu’en 1990…. Nous étions supposés avoir une reprise en 2013, nous en sommes à 0 % sur les 12 derniers mois. Le secteur privé ne connaît qu’une très faible croissance en France depuis prés de 10 ans et est en quasi stagnation depuis quatre ans. Pour la première fois depuis 1945, le PIB par habitant a baissé en France depuis quelques années. La France s’appauvrit donc année après année et avec elle le Français moyen.

En revanche, le secteur public, que j’appelle finement et depuis longtemps « le secteur communiste », a connu une croissance ininterrompue depuis 1973. Par exemple, pas une seule fois depuis 1987, la croissance du secteur communiste n’a été inférieure à celle du secteur capitaliste, ce qui est bien pour un pays qui a été géré par des ultralibéraux depuis cinquante ans… si l’on en croit toutefois l’extrême gauche ou l’extrême droite.

Trop de fonctionnaires en France ?

Les fonctionnaires ont toutes les qualités de la terre, mais ils ne travaillent pas pour les exportations et il faut que le secteur privé les paie. Il y a 40 % de fonctionnaires de plus par 10 000 habitants en France qu’en Allemagne. Et donc, les coûts du travail français restent très supérieurs aux coûts du travail allemands, ce qui nous amène à une détérioration constante de nos comptes extérieurs, signe patent de notre perte de compétitivité. Quand un pays sans croissance voit ses comptes extérieurs se détériorer, c’est qu’il est vraiment non compétitif. C’est le cas de la France aujourd’hui.

Question : un pays où l’économie communiste fait 57 % du PIB a-t-il jamais été compétitif et a-t-il jamais connu une hausse de son niveau de vie ? La poser c’est y répondre.

A cause de cette perte de compétitivité (il faut bien que quelqu’un paie), les marges des sociétés françaises ne cessent de baisser et se retrouvent à un plus bas historique, ce qui empêche toute embauche, et fort logiquement le chômage ne cesse de monter. Remarquons au passage que les marges des entreprises allemandes sont deux fois supérieures aux marges des entreprises françaises.

La dette explose

Avec une économie qui ne croît pas et un chômage qui monte, le déficit budgétaire se creuse à nouveau, puisque les rentrées fiscales baissent tandis que les dépenses augmentent, et donc le déficit général ainsi que le déficit primaire recommencent à se creuser. Et en plus, la France est en « cavalerie » puisqu’elle emprunte non seulement pour payer ses dépenses de fonctionnement mais aussi pour payer les intérêts sur sa dette passée.

Quant au déficit général, d’après les prévisions de début d’année 2013, nous devions être à 3 % fin 2014 : il sera à 4,1% et je suis prêt à parier que nous serons plutôt à 4,5 %Et du coup la dette explose à la hausse et se rapproche des 100 % de dettes par rapport au PIB (niveau où souvent la croissance s’arrête).

Bien pire, la France a un taux de croissance inférieur aux taux d’intérêts qu’elle paie (sur sa dette) et donc se retrouve dans une « trappe à dette » : si un pays emprunte à 2 % et croit de 0,5 % par, alors il ne faut pas être actuaire pour comprendre que la faillite est inéluctable. Ce qui veut dire que le ratio dette sur PIB va continuer à monter bien au-delà de 100% et que nous serons de plus en plus en situation de cavalerie.

Et chacun sait que le jour où les taux longs vont commencer à monter, la musique va s’arrêter puisque chaque hausse de 1% du coût de nos financements fera monter le déficit de 1 % en pourcentage du PIB.

M. Valls n’achète pas au plus haut

Economie non concurrentielle, croissance économique absente, forte hausse du chômage, situation budgétaire désespérée, trappe à dettes, le moins que l’on puisse dire est que M. Valls n’achète pas au plus haut. Mais j’ai toujours pensé que seule la gauche pouvait réformer notre pays, tant le parti bonapartiste qui fait office de droite dans ce pays est nul.

Encore une fois, je ne connais pas M. Valls, mais j’ai un peu d’espoir : les seules réformes que la France aient connues ont été faites par la gauche quand M. Bérégovoy était Premier ministre ou ministre des finances. Pour que la France se réforme, historiquement il faut donc la gauche au pouvoir et qu’un homme de caractère et de devoir la dirige. M. Hollande clairement ne remplit pas les conditions requises. Aura-t-il l’intelligence de laisser son Premier ministre faire le sale boulot, comme Louis XIII le fit avec Richelieu ou Mitterrand avec Bérégovoy ? Et M. Valls a-t-il les qualités requises ? Je n’en sais rien mais on peut toujours rêver…

M. Valls semble avoir un certain (« mauvais »?) caractère, et compte tenu du bref état des lieux que je viens de brosser rapidement, je peux assurer le lecteur qu’il va en avoir bien besoin.

Je lui souhaite donc toute la réussite du monde.

Charles Gave


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