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1/11/11 Charles Gave
       Comment les « oints du Seigneur » nous ont
                           conduits à la faillite !

Thomas Sowell est l’un de ces grands esprits qui honorent les Etats Unis : noir, élevé dans le sud des Etats-Unis à une époque où la ségrégation y sévissait encore (1930), il est parvenu, à force de courage et de volonté, à devenir professeur d’économie dans les plus prestigieuses universités des Etats-Unis sans bénéficier d’aucun passe droit (Cornell University, Brandeis University, UCLA). Patriote, ancien « marine », libéral autant qu’on peut l’être, docteur en économie de l’université de Chicago, muni d’une plume fort aiguisée, il commente l’actualité dans des chroniques régulières reprises dans de nombreux journaux aux USA et est résident du « Hoover Institute», le think tank libéral de la côte Ouest. Un grand, un très grand monsieur…

Pourquoi, doit se demander le lecteur, suis-je en train de mentionner Thomas Sowell ?

D’abord, parce que parmi les lecteurs qui lisent l’anglais, certains seront sans doute ravis de faire sa connaissance (le livre de référence est le « Thomas Sowell’s reader»), mais ensuite et surtout parce que cet homme affûté est à l’origine de concepts qui nous permettent aujourd’hui de décrypter la vie économique, sociale ou politique de façon particulièrement utile. L’un de ces concepts est celui des quatre marches qui mènent à l’enfer.

Tout commence avec ceux que Sowell appelle les « oints du Seigneur » (the anointed), qui savent bien sûr mieux que le peuple ce dont le peuple a vraiment besoin. Ces bonnes âmes, fort souvent hélas, estiment qu’un problème qui existait peut être (ou peut être pas) doit être traité toutes affaires cessantes.

Etape numéro 1 donc : Découverte du problème.

Immédiatement, nos hommes présentent des solutions qui curieusement passent toujours par l’accroissement du rôle de l’Etat et de leur pouvoir - à eux - tandis que ce sont eux et leurs troupes qui seront bien entendu en charge de mettre en place la dite solution. La solution préconisée est mise en place (Etape numéro 2). De cette « solution », ils attendent une amélioration de la situation et l’arrivée inéluctable dans ce que Sowell appelle le scénario A.

Les opposants expliquent que rien de tout cela ne va marcher et que nous allons nous retrouver en face de la situation Z. Les « oints du Seigneur » et les médias (les médias sont remplis d’« oints du Seigneur ») accusent immédiatement les opposants d’être des esprits simplistes, de manquer de la compétence nécessaire pour juger (qu’eux ils ont bien sûr), d’égoïsme et, cerise sur le gâteau, d’être vendus aux forces du grand capital.

Inéluctablement, la situation se détériore et nous nous retrouvons, comme l’avait prévu les opposants en Z.

Nous nous retrouvons dans une situation bien pire que celle qui prévalait au départ, sauf pour nos « anointed » bien sûr, qui ont vu leurs pouvoirs et leur prestige s’accroître considérablement.

Comme les oints du Seigneur possèdent la Vérité et que leur rôle est de la délivrer au peuple émerveillé et reconnaissant, la contre attaque s’organise autour de trois principes (phase 4).

1. La situation aurait été bien pire si la solution qu’ils ont recommandée n’avait pas été adoptée, et l’échec, qui n’est que temporaire, vient du fait que leur solution n’a pas été appliquée avec assez de vigueur.

2. Des facteurs nouveaux et non prévisibles sont venus déranger leurs plans qui, sans ces facteurs nouveaux, auraient fonctionné à la satisfaction générale, et quiconque en douterait devrait être envoyé dans un asile psychiatrique.

3. Les opposants restent de toutes façons ce qu’ils ont toujours été, des esprits simplistes et sans intérêt. Ils n’ont eu raison que par hasard et d’ailleurs il faudrait qu’ils puissent prouver que la situation désastreuse actuelle a été créée de toutes pièces par les recommandations de nos oints du Seigneur et non pas par des facteurs exogènes (voir point n°2).

En lisant cet article, je riais tellement que ma chère épouse m’a demandé ce qu’il y avait de si drôle dans ce livre d’économie, tant il s’applique à mon cas personnel et à l’analyse que j’ai pu faire sur l’euro.

Ce schéma d’analyse permet de décrypter merveilleusement à peu prés toutes les déclarations de nos chers (oh combien!) hommes politiques qui, en France, peuvent tous être qualifiés d’ « oints du Seigneur », comme notre bon Roi qui allait se faire couronner à Reims. Eux, ils demandent à Duhamel (éternel passe-plat), à Minc ou à Attali de leur briser l’ampoule sacrée sur le front et le résultat est le même.

Pensons à l’euro par exemple, qui, d’après nos chantres mentionnés plus haut, devait rendre l’Europe plus harmonieuse, faire baisser le chômage, assurer notre indépendance envers les USA, rendre les femmes plus belles et le ciel plus bleu (et j’en oublie sûrement). A l’arrivée, chacune des étapes décrites par Sowell ayant été parcourues, nous avons la moitié de l’Europe en faillite, nous sommes sous la coupe allemande, la dépression économique nous guette et le chômage explose partout.

Et donc je lance un petit concours parmi les lecteurs.

Analysez les problèmes auxquels nos élites appliquent la méthode de Sowell et envoyez nous ces analyses ([email protected]).

Pas de voyage gratuit, mais les meilleures analyses seront publiées, avec le nom des talentueux contributeurs. A vos plumes.

Charles Gave


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