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1/5/13 Charles Gave
           Avis de recherche : où sont donc passés
                         les Oints du Seigneur ?

Les « Oints du Seigneur » sont ces gens qui se sentent appelés par une force supérieure à guider le Peuple, l’Europe, voire l’Humanité toute entière vers des lendemains qui chantent. Hélas, leur parcours vers la Gloire est en général accompagné de désastres inouïs. On ne fait pas d’omelettes sans casser des œufs, me disent leurs supporters. Ce à quoi je réponds que je vois beaucoup d’œufs cassés mais jamais une omelette.

L’analyse du grand économiste américain Thomas Sowell (noir, ancien marine et patriote en diable) démontre que ces bienfaiteurs de l’humanité procèdent toujours de la même façon.

Tout d’abord, ils « identifient » un problème (qui en général n’existe que dans leur imagination).

Ayant identifié le problème, ils proposent une solution.

La solution implique toujours un accroissement du rôle de l’Etat et, comme ils sont en général payés par ce même Etat, un accroissement de leur pouvoir à eux… Voilà qui n’est guère surprenant.
 

Apres moult campagnes de presse, leur solution est adoptée. Ceux qui s’opposent à cette solution sont traités de réactionnaires et de petits esprits égoïstes (eux, ils sont généreux, avec l’argent des autres, bien sûr…)

La situation, à chaque fois, se dégrade très rapidement après l’adoption de la « solution ».

Qu’à cela ne tienne, nos Oints du Seigneur ont déjà dans leurs cartons (j’ai presque envie de dire dans leur boîte à outils), une solution aux problèmes que la précédente solution a créés.

Et on repart pour un tour…

L’exemple parfait de cette démarche peut se trouver dans l’euro.

Avant l’euro, l’Europe allait très bien. Depuis, nous vivons en plein cauchemar. Et l’on attend toujours l’acte de contrition des Oints du Seigneur de l’époque et de leurs chefs bien aimés, les ineffables messieurs Delors et Trichet qui, à eux deux, ont été capables de ruiner leur pays en vingt ans. On ne peut qu’être admiratif. Ruiner un pays aussi riche et talentueux que la France, en aussi peu de temps, requiert une intelligence exceptionnelle.
J’écrivais il ya douze ans que l’euro allait foutre en l’air l’Europe, nous y sommes.

Et la solution que propose M. Attali (Oint du Seigneur entre tous, et depuis fort longtemps : il n’y a pas un désastre auquel il n’ait participé activement depuis 1981) est de supprimer la démocratie, en donnant le pouvoir à un Conseil de Sages (dont il ferait partie, bien sûr), ce qui est en fait le but ultime de toute cette classe de sangsues : supprimer la démocratie et créer des instances dirigeantes non soumises à l’élection (pouah!) qui pourront rouler dans des voitures de fonction avec chauffeur sans jamais craindre de devoir prendre le métro à nouveau.

Ils y sont arrivés à Bruxelles, pourquoi pas à Paris ?

Mais je ne veux pas parler encore une fois de l’euro et de ses thuriféraires, tant le désastre est maintenant patent. Il ne sert à rien de tirer sur une ambulance. Je veux parler de ce qui se passait il y a à peu prés un an, pendant la campagne présidentielle française.

Dieu sait que je n’avais guère été impressionné par Nicolas Sarkozy et que l’on ne peut me compter parmi ses chauds supporters. Mais enfin… Il avait essayé de faire une ou deux réformes… et les temps avaient été difficiles. Malgré cela, toute l’intelligentsia économique française (oxymore s’il en fut) ou presque se fendit de pétitions, signées par les économistes français mondialement connus (à Paris, par France Inter), pour appeler à voter pour M. Hollande.

Et tous de nous asséner leurs titres, professeurs dans telle école ou de telle université prestigieuse, membres d’associations professionnelles reconnues, participant à tous les comités Théodule que notre République, bonne fille, organise pour arrondir les fins de mois de ceux qui peuvent critiquer les Princes. Aucun des suspects habituels ne manquait à l’appel.

Et de nous expliquer qu’ils avaient soigneusement étudié le programme (?) de Francois Hollande et qu’ils garantissaient à l’électeur que si ce programme était mis en pratique, une fois leur candidat élu, alors tout s’améliorerait en France très rapidement. (Ils nous avaient déjà assuré que l’euro serait un immense succès, d’où mon inquiétude de l’époque). Au vu de ces pétitions, accompagnées de passages constants à la télévision ou à la radio des mêmes personnages, j’avais écrit ma première chronique sur les Oints du Seigneur, que le lecteur doit pouvoir retrouver dans les archives. Et elle n’était pas élogieuse.

Un peu moins d’un an après, qu’en est- il ? Eh bien, comme je l’attendais (et comme eux ne l’attendaient pas du tout), l’économie française est en train de s’effondrer comme rarement dans son histoire.

Que le lecteur en juge.

L’INSEE effectue chaque mois une enquête auprès des chefs d’entreprise - ces vampires - et cette enquête nous permet d’anticiper quelque peu l’évolution à venir du PIB français.

Il est tout à fait évident que le PIB français - hors dépenses gouvernementales - va se contracter d’au moins 2 % d’année en année, et sans doute plus (fin juin), et que la récession qui s’annonce va être au moins aussi sévère que celle de 1993, pendant laquelle le Crédit (ou plus exactement le Débit) lyonnais avait sauté, alors que M. Trichet était à son conseil et n’avait rien vu venir, comme d’habitude. Que je sache, il n’a pas rendu ses jetons de présence.

Si les sondages de l’INSEE continuent à se détériorer (et cela est quasiment certain), il est à craindre que la France soit entrée non pas dans une récession, mais dans une dépression, un peu comme l’Italie, le Portugal, la Grèce, Chypre, l’Irlande l’Espagne (merci M. Delors, merci M. Trichet).

Le coût du travail est inférieur en Allemagne à ce qu’il est en France, et il en est de même pour le coût du capital. Quel est le chef d’entreprise masochiste qui va bâtir une usine en France, assuré qu’il sera de se faire mettre en pièces par son concurrent allemand ? Et si par hasard il gagnait de l’argent en faisant des « profits », mot horrible que M. Ayrault n’a pas cité une fois dans son discours de « soutien » aux entreprises, ils lui seraient volés, de façon démocratique bien sûr, au moyen d’un vote obtenu par les soins de la majorité de fonctionnaires qui peuplent l’Assemblée nationale.

Et bien entendu le chômage et les déficits budgétaires vont exploser à la hausse. Il n’y a jamais eu de récession en France sans que le déficit budgétaire ne se creuse d’au moins 2 points de PIB et que le chômage ne monte massivement.

Bref, M. Hollande n’a rien compris, ne connaît rien en économie, sa boîte à outils est vide et l’a toujours été, et quasiment toutes les mesures qu’il a prises sont incroyablement contreproductives.

Et pourtant il fait ce qu’il a dit qu’il allait faire. Donc je ne lui en veux pas. Il a simplement dépassé - et largement - son niveau d’incompétence, ce qui est bien normal pour un homme normal appelé à des fonctions anormales.

Mais vous, messieurs les signataires de pétitions? Ou êtes-vous? On ne vous voit plus! On ne vous entend plus! Qu’avez-vous à dire pour votre défense ? Hélas, il n’y a que deux explications à vos erreurs.

Si l’on est socialiste et honnête, on est incompétent.

Si l’on est socialiste et compétent, on n’est pas honnête.

Vous êtes socialistes et fiers de l’être, c’est ce que vous nous disiez il y a un an.

Et donc :

- ou bien vous aviez compris que ces mesures allaient nous amener au désastre dans lequel nous sommes et vous pensiez que M. Hollande ne les mettrait pas en pratique, et donc vous n’êtes pas honnêtes, et votre crime est pire que celui de M. Cahuzac puisqu’en tant qu’intellectuels vous avez péché contre l’Esprit.

- ou bien vous pensiez, en toute bonne foi, que ces mesures allaient permettre à l’économie française de se reprendre, et je plains vos étudiants (vous êtes tous professeurs) d’avoir comme maîtres des gens certes honnêtes, mais totalement incompétents.

Mais après tout, et comme je l’ai entendu souvent aux USA: si vous étudiez une matière et que vous ne la maîtrisez pas bien, enseignez- la! Vous êtes l’exemple vivant de ces vérités paradoxales. Je suis cependant prêt à parier que dès que la gauche aura perdu le pouvoir, l’on n’entendra plus que vous. Sauf, bien sûr, si l’on venait à fermer France Inter, ce qui serait une mesure de salubrité publique.

Charles Gave

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