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1/11/11 Thierry Desjardins
      Sarkozy va se présenter au G 20 de Cannes en
                    mendigot qui fait la manche !

Cannes va nous offrir un festival inédit, celui du G20. Mis à part Sarkozy qui va le présider, les Français semblent n’y attacher aucune importance. Ils ont tort. Ce grand spectacle marquera en fait la fin d’un monde et le vrai début de notre 3ème millénaire. Ce sera pour nous le festival de la catastrophe. Les stars qui vont monter les marches seront à peu près les mêmes que d’habitude mais les rôles auront totalement changé.

Jusqu’à présent les scénarios présentés lors des réunions de ce club étaient à l’eau de rose. Les « Grands », les « puissants » de notre vaste monde se congratulaient, faisaient mine de palabrer, énonçaient un grand nombre de lieux communs, puis, ravis du tas d’or sur lequel ils étaient assis confortablement, se faisaient prendre en photo, sagement alignés comme les élèves d’une petite classe.

Que deux ou trois milliards d’êtres humains de la planète crèvent de faim et n’aient pas accès à l’eau courante, que les pôles se mettent à fondre, que les déserts avancent sur certains continents, que des maladies qu’on croyait éradiquées à tout jamais réapparaissent, les laissait parfaitement indifférents. Ils parlaient business, cours des changes, prix des matières premières. Les plus anciens, protecteurs et un brin narquois, donnaient des conseils aux nouveaux venus, les « nouveaux riches », qu’ils avaient bien voulu accueillir parmi eux.

Et brusquement on s’aperçoit que tout a changé. Les grands aînés, à force de se la couler douce et de jouer au casino, ont fait faillite. Ils sont totalement ruinés, smokings élimés et chaussures vernies trouées. Des clochards. Et les autres, les « petits jeunes » qui, hier encore, entraient en scène sur la pointe des pieds pour s’asseoir autour de la table, se mettent à parler fort et à rire à gorge déployée, en bousculant le protocole si bien établi.

On ne va plus se congratuler entre amis du même monde. On ne sera plus « entre riches ». Il y aura, d’un côté, les fondateurs du club, « les nouveaux pauvres » et, de l’autre côté, ceux qu’on avait bien voulu coopter par gentillesse et qui sont devenus les véritables patrons, les seuls, triomphants, arrogants, sans pitié, maîtres du monde.

Les premiers ne donneront plus des conseils aux autres, n’exigeront plus qu’ils se calment, qu’ils arrêtent de leur envoyer leur camelote à bas prix, qu’ils réévaluent leurs devises, qu’ils baissent le prix de leurs barils. Ils feront la quête et pitié, tendant en tremblotant leur sébile. Les autres souriront, se souvenant qu’il n’y a pas si longtemps encore on les considérait avec commisération comme des « sous-développés », au mieux des « émergents ».

On imagine déjà le Chinois qui n’a plus sa natte dans le dos regardant l’Américain qui ne pourra plus jouer au cow-boy, l’Indien qui n’a plus rien d’un fakir famélique dévisageant le Français à la baguette de pain rassie, le Brésilien qui ne danse plus la samba face à l’Anglais qui a perdu son chapeau-melon. On entend déjà le chœur des nouveaux pauvres entonnant sa supplique : « Soyez sympas, les gars, nous avons une mauvaise passe. Le sort s’est acharné contre nous. Mais nous allons nous refaire. Vous n’auriez pas cent balles ? Vous n’allez tout de même pas nous laisser crever comme çà ?»

Parfois, ceux qui ont gagné le banco, sortant du casino, jettent une piécette aux ivrognes affalés sur le trottoir et qui, eux, ont tout perdu. Mais pas toujours. La fourmi prend souvent plaisir à dire à la cigale : « Vous avez chanté tout l’été, eh bien, dansez maintenant ! ».

Là, les choses vont être un peu différentes. Pour une fois, les nouveaux riches ont besoin des pauvres. Pour pouvoir continuer à s’enrichir. Tous les commerçants le savent, il faut parfois faire crédit à ses clients pour qu’ils continuent à acheter. Sinon, il n’y a plus qu’à fermer boutique. Mais ils savent aussi qu’à force de faire crédit, on fait faillite. Alors ils prennent des garanties, des hypothèques, voire ils envoient les huissiers saisir l’argenterie et ce qui reste de meubles.

Sarkozy s’imaginait qu’en présidant ce G20 cannois il apparaîtrait aux yeux des électeurs de la prochaine présidentielle comme le maître du monde et de l’univers. Au premier rang d’une Europe en débandade et en haillons, avec un pays qui a 1700 milliards de dettes, 4 millions de chômeurs et une croissance à moins de 1%, il va faire figure devant le Chinois, l’Indien, le Brésilien, le Russe, le Sud-Africain de mendigot qui fait la manche, au cours de ce sommet qui symbolisera ce que les historiens appelleront sans doute un jour la fin programmée, après quelques siècles de triomphe, de la suprématie de l’Occident.

Sarkozy n’y est bien sûr pas pour grand-chose, mais ce n’est pas lui qui remportera la Palme d’or.

Thierry Desjardins




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