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9/10/10 Thierry Desjardins
          Sarkozy est allé à Canossa !

Nicolas Sarkozy qui ne croit ni en Dieu ni au Diable mais qui ne sait plus à quel saint se vouer s’est rendu au Vatican.

Il a fait ses comptes. Les catholiques pratiquants représentent 15% de l’électorat français. Ce qui n’est pas négligeable. 71% d’entre avaient voté pour lui en 2007. Encore merci. Mais aujourd’hui ils ne sont plus que 50% à lui faire confiance. C’est embêtant.

Avec une certaine naïveté, Sarkozy s’imagine qu’en allant voir le Très Saint Père, il va pouvoir faire rentrer au bercail les brebis égarées. C’est donc lui qui a demandé cette audience. Benoît XVI la lui a accordée, ce qui ne veut pas dire qu’il lui ait accordé l’absolution pour autant.

Le Pape a été choqué par l’affaire des Roms que Sarkozy, en totale contradiction avec le droit et la morale (chrétienne ou non) la plus élémentaire, avait fustigés collectivement, désignés à la vindicte populaire et décidé d’expulser.

Certains veulent croire qu’en affirmant, le 22 août dernier, qu’il fallait « accueillir les légitimes diversités humaines à la suite de Jésus venu rassembler les hommes de toutes les nations et de toutes les langues », le Pape n’avait absolument pas voulu évoquer le problème des Roms en France mais qu’il avait simplement commenté l’Evangile du jour.

L’Evangile a bon dos. Le simple fait que le souverain pontife ait prononcé cette phrase en plein débat sur les Roms et, de plus en français (dans une allocution en italien), prouve bien, s’il en était besoin, que le Pape ne parlait pas à son chapeau. Il condamnait, sans équivoque et en ternes vaticanesques, le nouvel épisode de la politique sécuritaire du président français.

Nu pied et la corde au cou, Sarkozy a donc imploré le Pape de lui faire une nouvelle lecture de l’Evangile et tenté de lui expliquer qu’il n’a péché que par… distraction.

Même s’il est allemand comme le lui a reproché le meilleur ami de Sarkozy, Alain Minc, ce qui n’a peut-être pas été apprécié au Vatican, le Pape est plein de mansuétude et on imagine mal qu’il refuse au président français la petite bénédiction qu’il est venu quémander.
D’autant plus que dans son acte de contrition, le pécheur va lui rappeler son discours du Latran de décembre 2007 (sur « la laïcité positive » avec un curé infiniment supérieur à l’instituteur), leurs embrassades de septembre 2008, lors de la visite pontificale à Paris, et qu’il ne va pas manquer de lui faire part de toute l’émotion qu’il vient de ressentir aussi bien pendant la projection, à l’Elysée, du film « Des hommes et des Dieux » qu’au cours du « pèlerinage » qu’il a effectué à Vézelay, la semaine dernière. Quand Sarkozy est en campagne électorale, il ne néglige aucun détail et n’hésite devant aucune tartufferie.

Seulement voilà ! Staline demandait ironiquement : « Le Pape, combien de divisions ? ». La question du jour est : le Pape combien d’électeurs ? Et Sarkozy a tort de croire qu’en allant faire ses simagrées au Vatican il va récupérer 7% de l’électorat français.

D’abord, parce que tous les catholiques pratiquants ne sont pas des « papistes » inconditionnels. Ensuite et surtout, parce que bon nombre de ces fidèles ont perdu la foi en Sarkozy bien avant l’affaire des Roms et la condamnation du Pape.

Le soir de l’élection de Sarkozy, ils avaient été ravis d’apprendre que le nouvel élu allait, comme on le leur affirmait, faire une retraite dans un couvent avant de prendre ses fonctions, « pour mieux se retrouver avec lui-même ». Or, ils ont vu Sarkozy aller se goberger au Fouquet’s avec ses copains de « la haute » et embarquer à bord du yacht de Bolloré. Les grenouilles de bénitier avaient été très déçues.

Puis, aux sorties de messe, on avait beaucoup commenté le (deuxième) divorce du président et, quelques semaines après, son remariage avec un top-modèle au passé sulfureux. On ne lui donnait plus le Bon Dieu sans confession et on commençait même à trouver que ce président n’était vraiment pas très catholique.

Et tout a continué avec des pêchés plus ou moins véniels : l’affaire du fils Jean qu’on voulait caser à l’Epad, l’embauche de Frédéric Mitterrand célèbre pour ses éloges de l’homosexualité, la présence de l’humoriste Jean-Marie Bigard au Vatican, une politique qui n’était plus vraiment celle des familles, les scandales « frico-politiques » en cascades, etc.

Les catholiques pratiquants sont des braves gens qui ont encore ce qu’on appelait autrefois « un restant de morale ». Mais surtout ils ne pratiquent pas le culte du Veau d’or et considèrent ceux qui s’y adonnent comme des impies bons à jeter au bûcher. Or, c’est bien là le péché originel de la sarkozie.

Quelle que soit la pénitence que le Pape ait infligée à Sarkozy, ils ne pardonneront jamais au président de la République d’avoir fait de l’argent-roi l’idole de son règne. Au fond, ils ressemblent à beaucoup de Français.

Thierry Desjardins


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