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26/6/10 Thierry Desjardins

Sarkozy, un président à bout de souffle !
 

Deux millions de manifestants furieux dans les rues, un chômage qui monte encore et qui atteint 4 millions toutes catégories confondues, des scandales qui éclatent un peu partout et qui décrédibilisent totalement le gouvernement, un président que se fait insulter au cours d’une promenade nocturne en banlieue, çà commence à faire beaucoup, et sans parler des performances de notre équipe de football. On ne voit vraiment pas comment Sarkozy pourrait reprendre la main.

Sa grande réforme des retraites devait être sa planche de salut pour pouvoir se représenter aux présidentielles de 2012. A l’Elysée, on nous racontait que, si le bilan du quinquennat ne serait sans doute pas aussi éblouissant qu’on aurait pu l’espérer, Sarkozy allait au moins pouvoir mettre à son actif cette réforme essentielle que tous ses prédécesseurs avaient renoncé à aborder.

Malheureusement, pour l’instant et tel qu’est le projet, il ne semble pas que cette réforme puisse emporter l’adhésion des électeurs de 2012, même si chacun reconnaît qu’il faudrait bien faire quelque chose pour assurer à terme l’équilibre de notre système.

Pourquoi avoir annoncé brutalement un recul de l’âge légal de la retraite ? Au lieu de s’attaquer à ce symbole des 60 ans, il aurait été plus habile de se limiter à augmenter, progressivement et sensiblement, le nombre des années de cotisation nécessaires pour avoir une retraite à taux plein. Cela revenait pratiquement au même et on ne s’en prenait pas au « tabou ». Pourquoi avoir affirmé que la « pénibilité » ne serait prise en compte qu’avec un certificat médical attestant une « invalidité de plus de 20% » ? C’était évidemment nier le principe même de la pénibilité.

Autant de maladresses qui ne pouvaient qu’ouvrir un boulevard à l’opposition et aux syndicats.

On peut d’ailleurs se demander si un président, à bout de souffle (sans avoir fait grand-chose, finalement) et rejeté par 65% de la population d’après tous les sondages, a la moindre chance de faire accepter par les Français une réforme douloureuse et qui les concerne tous. On a l’impression qu’aujourd’hui, même si Sarkozy annonçait une augmentation massive des salaires et une baisse généralisée des impôts, la France entière descendrait dans la rue pour crier son mécontentement.

Il faut dire qu’en plus Sarkozy n’a vraiment pas de chance. Il avait confié cette réforme à Xavier Darcos. Puis, il a viré Darcos en victime expiatoire de l’échec cuisant des régionales et il a refilé le bébé à Eric Woerth, son nouvel enfant chéri. Et voilà que Woerth est totalement discrédité par l’affaire Bettencourt qui devrait l’inciter à la démission mais qui lui interdit, en tous les cas, de faire face dignement à ses interlocuteurs qui ne semblent pas décidés à lui faire le moindre cadeau.

On nous dit maintenant que, pour remonter sur son cheval, Sarkozy va sortir de son chapeau quelques idées fracassantes afin de « moraliser la vie politique ».
Sarkozy « moralisateur », l’image fait déjà rigoler les Français qui se souviennent du Fouquet’s, du yacht de Bolloré, de la Rolex, de l’augmentation considérable qu’il s’est lui-même accordée à peine arrivé à l’Elysée, de Jean Sarkozy candidat à l’EPAD, de l’affaire des sous-marins pakistanais (qui ne fait que commencer), etc.

Mais on pourrait le prendre au mot. Puisqu’il est visiblement inefficace de rappeler à nos dirigeants qu’ils doivent simplement « être honnêtes », un concept totalement obsolète de nos jours, il suffirait, par exemple, d’interdire toute activité privée rétribuée à nos élus (députés, sénateurs, députés européens, conseillers régionaux, maires de grandes villes). Il est totalement scandaleux que plusieurs parlementaires soient aussi des avocats dans des cabinets d’affaires (on pense naturellement au président du groupe UMP Jean-François Copé, mais il est loin d’être le seul dans ce cas). Les traitements que touchent nos élus devraient être entièrement suffisants pour subvenir à leurs besoins.

Ces traitements devraient d’ailleurs être plafonnés en cas de cumul de mandats. On pourrait décider qu’un élu ne peut pas toucher plus de 10.000 € par mois de la République, quels que soient ses mandats (parlementaire + maire + président de communauté de communes ou d’agglomération, etc.).

Pour ce qui est des logements de fonction, la révolution à faire est simple. Ils ne devraient être attribués qu’aux ministres (ou aux très hauts fonctionnaires) dont la présence est indispensable 24 heures sur 24 dans les locaux du ministère : Premier ministre, ministre de l’Intérieur, des Affaires étrangères, de la Défense. A qui fera-t-on croire que le ministre de l’Agriculture, des Anciens combattants ou de la Culture a besoin d’être logé sur place ? Il y a toujours le téléphone en cas d’urgence.

Le scandale Woerth a soulevé le problème des conjoints encombrants. Il suffirait alors de décréter que personne ne peut prendre un poste ministériel si un de ses proches a une activité dans ce même domaine. Nul n’a jamais soupçonné Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d’Etat aux technologies nouvelles, de la moindre indélicatesse, mais il est tout de même ennuyeux que son propre frère soit l’un des ténors de l’Internet.

Ces quelques mesures de simple bon sens –mais il y en a bien d’autres- feraient sans aucun doute plaisir à une opinion excédée, écœurée. Il y a fort à parier qu’elles ne seront même pas évoquées.

Thierry Desjardins


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