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7/9/15 Jacques Clouteau
     
                L’Hermione a failli ne pas partir !

Regardez cette magnifique image de l'Hermione revenant de sa tournée américaine. Quelle beauté, quelle fierté, quel honneur d'avoir construit un si beau vaisseau, exacte réplique de la première Hermione du jeune Lafayette parti aider les Etats-Unis à gagner leur indépendance. La France possède encore des hommes et des femmes, des artisans capables d'une telle prouesse.

Puis fermez les yeux et imaginez un inspecteur du travail montant à bord avec son gros code rouge sous le bras, saisissant son stylo à bille et notant sur son bloc-notes la liste des manquements scandaleux à la sécurité.

Je cite, au hasard... :

- la coque : en bois, un encouragement honteux à la déforestation de la planète.
- les échelles de corde : pas aux normes, elles doivent être en aluminium et révisées chaque année par la commission de sécurité.
- les poulies : pas aux normes, elles sont encore en bois au lieu d'être en acier.
- les vergues : pas aux normes, envoyer des marins là-dessus est une insulte au code du travail, installer de toute urgence des moteurs électriques sur chaque filin ou un ascenseur sur chaque mât.
- les voiles : pas aux normes, peuvent se déchirer et blesser un marin en cas de coup de vent, monter un vrai moteur sur ce bateau.
- les ponts : pas aux normes, dangereux en cas de pluie, poser un revêtement plastique antidérapant.
- le bastingage : pas aux normes, on peut être éjecté en cas de tempête, boulonner un grillage protecteur d'au moins 2 m au-dessus.
- la passerelle d'accès : pas aux normes, puisque la pente dépend de la marée, rendant l'accès impossible aux personnes handicapées.
- les quarts de nuit : en plein vent, par tous les temps, doivent être effectués dans un local protégé.
- les ordres à la voix : peuvent conduire à de graves laryngites, installer micros et haut-parleurs à chaque poste de travail.

Refermez de nouveau les yeux et imaginez un inspecteur de l'Urssaf arrivant à bord avec son très gros très code très rouge sous le bras, saisissant son stylo à bille et notant sur son bloc-notes la liste scandaleuse des délits commis par le capitaine :

- les horaires de travail : dépassent largement les 35 heures, puisque les marins ne peuvent revenir à leur domicile après leur quart. Etant alors à la disposition de leur employeur 24/24, ils doivent être payés ce même temps, même s'ils dorment.
- l'incidence cachée du changement de fuseau horaire lors d'une traversée atlantique peut engendrer une perte de salaire, puisque le vaisseau, quand il s'éloigne vers l'ouest, gagne subrepticement du temps sur la course du soleil, temps qui n'est pas compté en heures supplémentaires.
- certains marins profitent de leur repos pour pêcher du poisson, engendrant donc un avantage en nature sur lequel ils ne paient aucune cotisation sociale.
- on a vu certains voyageurs donner un coup de main à hisser les voiles, il y a donc là un cas avéré de travail dissimulé.
- quant au vent qui fait le gros du boulot, engendrant du chômage parmi les rameurs, il conviendrait de forfaitiser une cotisation sociale selon la force exercée sur les voiles, à la charge bien sûr de l'armateur.

Conclusion du procès-verbal : le vaisseau Hermione doit être immobilisé à quai jusqu'à ce que les modifications exigées par la sécurité et les lois sur le travail soient réalisées. Sinon les héritiers Lafayette et consorts, ainsi que la ville de Rochefort et le département de la Charente-Maritime seront condamnés à de lourdes amendes, et à l'indemnisation du préjudice que les équipages ont subi ou auraient pu subir.

Et notre conclusion à nous : on va les garrocher à la baille....

Jacques Clouteau


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